Désordre alphabétique

Alphabet en barreA l'entrée des élèves en sixième, sont organisées des évaluations à l'échelle nationale. Nos chères têtes blondes, brunes et rousses composent donc, en français et en mathématiques, sur de petits cahiers d'exercices destinés à faire le point sur les connaissances des élèves à leur arrivée au collège. Les résultats sont ensuite saisis dans un logiciel aussi performant que Word, aussi évolué que Notepad et aussi buggé que Windows - j'ai nommé J'ADE - pour être traités en aval par le Ministère de l'Education Nationale, qui a le chic pour les classer en proprettes statistiques, les arranger en grâcieuses courbes, les présenter en de chatoyants et colorés graphiques, en somme, pour alimenter des rapports dont les conclusions resteront lettres mortes dans quelques archives déjà poussiéreuses. Ces évaluations massives sont toujours l'occasion pour les profs de français et de maths, en début d'année, de mesurer combien celle-ci va être looooongue et ardue.

Ce soir, j'ai corrigé les chefs d'oeuvre de mes petits diablotins. Je suis partagée entre la stupeur et l'hilarité. Sur 24 élèves, seuls 5 élèves ont l'équivalent de ce qui serait la moyenne (si elle était calculée, mais surtout gardons-nous en !) La plus haute note approcherait les environs du 11/20. Tous les autres petiots ont une note inférieure à 10, la plupart tournent à des résultats de l'ordre de 06/20.

Dans l'absolu, on pourrait encore se consoler (ou s'aveugler) en estimant que les questions sont peut-être d'un niveau trop élevé. Un coup d'oeil à ces dernières nous ôte hélas tout recours à cette hypothèse ; jugez par vous-même à partir de cet échantillon, je crois, assez représentatif de l'ensemble :Il y a certes quelques questions d'un ridicule consommé, mais enfin, le niveau est au plancher.

L'une des questions soumet à la sagacité des enfants l'énigme suivante : "Donner me monsieur pardon pourriez renseignement un vous ? Dans cette suite de mots, comment les mots sont-ils classés ?" Voici la réponse, perturbante et profonde assurément, qui revient sous plusieurs plumes : "Les mot son classée dans le désordre alphabitique". Être classé dans le désordre : waaah, quel abîme de perplexité s'ouvre là ! Et pas n'importe quel désordre, hein : le désordre alphabétique ! Mes élèves sont plus brillants qu'il n'y paraît : ils intuitionnent rien moins qu'un avatar du principe de l'entropie. Moi je dis : quel talent ! biggrin

Saute-Mouton - http://realia.free.fr/sautemouton_avril/newsprt.php?lng=fr&pg=1715 - [Version PDF]