Marasme
Mes agneaux,
Me voici de retour, enfin, après une éclipse de 23 jours ! Puisque vous le réclamez, je m'en vais vous conter les raisons abracadabrantesques de ma "disparition", puisqu'ainsi Cec' la nomma...
C'est rien que la faute à Free.
Il y a tout juste 23 jours que ma connexion Internet disparut et fit "Pschiiit", comme dirait l'autre que j'ai déjà cité. Du jour au lendemain, en plein surf : plus rien que la blanche agonie de mon écran.
Ces interruptions de service étant légion chez Free, je ne m'inquiétai d'abord guère et pris mon mal en patience. Mais au bout de cinq jours, privée de tout accès Internet, je décidai de tenter l'entreprise la plus risquée de ma vie : contacter la Hotline de Free. (Vous avez vu la campagne de pub du Neuf ? Non ? Moi non plus, mais il paraît qu'elle vise très clairement le SAV de Free, à juste titre, comme la suite vous l'apprendra.)
Le technicien que j'eus au bout du fil, après une coûteuse attente de 13 minutes à 0.34 euros la minute, commença par s'assurer que j'étais cérébralement équipée, en me posant une série de questions hautement techniques, dont une dont la pertinence m'échappa quelque peu : avez-vous un numéro de téléphone portable à nous communiquer ? Mais enfin, je ne suis pas Hotlineuse et sans doute pas à même de saisir l'intérêt de cette indication dans la résolution de mon problème de connexion...
Cet expert me fit faire quelques manips que j'avais déjà répétées une dizaine de fois moi-même, m'exhorta à rebooter mon vieil et agonisant Anatole, en dépit de mes supplications car cela me coûta 6 nouvelles minutes d'attente à 0.34 euros la minute, Anatole n'étant pas ce qu'on appelle un ordinateur performant (son arthrite circuitique est légende) et m'apprit enfin que "ha oui ! je vois ! nous sommes en train de migrer votre serveur en ADSL 2 et il faut qu'on rebranche les fils, ce qui va prendre un peu de temps. Patientez". Me prend-il pour une demeurée ?, fut la question qui affleura à mon esprit cartésien tout au long de cette conversation.
Je pris néanmoins mon mal en patience pendant une dizaine de jours. Ne voyant nulle rémission à l'horizon de ce répit, Anne, ma soeur Anne, je me risquai de nouveau à un appel à la Hotline. (Un conseil en passant : appelez le dimanche matin, ces escrocs - ça y est, je m'emporte ! - sont plus prompts à répondre.) Le technicien me posa de nouveau conciencieusement sa sacro-sainte litanie de questions, le prompteur s'affolait... et il établit enfin un remarquable diagnostic : le serveur avait eu un accident, en cours de réparation, quel dommage, c'est navrant et le mieux était de patienter. Chez Free, au moins, on peut dire qu'ils ont trouvé la panacée universelle, comme les vendeurs de sirop multi-fonctions dans Lucky Luke. C'était, conclut-il avec une fierté non dissimulée, une simple question de jours, à quoi je rétorquai, passablement échauffée, que s'il s'agissait de 30 jours, il serait plus honnête de parler d'une question de mois. Le technicien ne sembla pas goûter cette saillie pourtant légitime et me renouvela ses bons voeux, tout en se torchant allègrement le fondement avec mes récriminations de cliente sur le compte de laquelle Free venait de ponctionner près d'une centaine d'euros, pour le passage en Freebox V.4 et pour une connexion dont je ne constatais toutefois que le dysfonctionnement...
Ce technicien m'ayant enjoint à la patience, j'allai pleurer chez mon voisin, lui-même heureux possesseur d'une Freebox, pour m'enquérir de l'état de sa connexion : je le trouvai désemparé, maugréant pêle-mêle contre Free, la mondialisation, France Télécom, l'incompétence généralisée et les services publics en grève. Quel soulagement ! Lui aussi était victime d'une défaillance de connexion et je trouvai alors une oreille complaisante, toute disposée à se griser de mon ire et de mes lamentations en mode "loop". A mon instar, il s'impatientait. Nous refîmes donc le monde et rêvâmes de conserve à la faillite de Free, par pur esprit de vengeance rageuse. Ceci ne régla nullement notre problème, mais médire et maudire étaient les seules thérapies collectives et sociales que nous trouvâmes à la mesure de notre énervement.
Quelques (notez l'euphémisme) jours s'écoulèrent encore. L'oubli commençait à corrompre mon centre nerveux : je ne savais plus comment lancer Internet Explorer, je ne parvenais plus à nommer mon FAI - ne sachant plus du reste si j'étais abonnée à un quelconque service - les noms des navigateurs concurrents m'échappaient ; j'avais oublié jusqu'à la signification des mots "historique de connexion" et "favoris" ; enfin, les cookies n'évoquaient plus à mon esprit embrumé que ces biscuits pépiteusement chocolatés, destinés à aggraver mon oedème fessier - merci au passage à DG pour cette litote incomparable.
Il me faut à ce stade du récit insérer une digression explicative, sans quoi les quelques lecteurs résiduels ayant survécu à ma prose ne saisiront pas les enjeux de la suite. Voilà, je me suis résolue à ne pas investir dans un achat immobilier. En réalité, c'est le marché immobilier qui a décidé pour moi, en (dés)accord avec ma banque. Bref, je reste dans mon 13m² parisien quelques années encore, afin d'économiser des deniers sur mon maigre salaire et d'investir dans un 20m² digne de ce nom dans quelques années - quelle promotion sociale, mazette ! J'en frétille d'impatience !
Trève d'ironie flasque, puisqu'il paraît que je vais moisir dans ma chambrette de bonne pendant une période suffisamment longue pour que l'idée de me jeter sous un pont me saisisse à intervalles réguliers (attention, il faut bien relire ce qui précède pour comprendre la blague), donc, disais-je, je décidai de rénover quelque peu mon intérieur pour en rendre la fréquentation moins insupportable. En premier lieu, je fis l'emplette d'une nouvelle lunette pour le siège des toilettes (sic) et achetai une nouvelle casserole, mais une Téfal, hein ! J'ai fait des folies, je sais.
J'étais tellement stupéfaite par la hardiesse de ces achats que, au moment de suspendre ma nouvelle casserole à son crochet, celle-ci m'échappa et alla se fracasser sur mon imprimante, qui hoqueta pendant quelques secondes, émit de rauques grésillements, sans toutefois dégager cette odeur caractéristique de brûlé qui émane d'ordinaire des carcasses défuntes. Ceci me laissa l'espoir qu'elle fonctionnait toujours. De fait, je pus imprimer mon cours de 5ème pour le lendemain. Hélas, je remarquai une singularité dans l'impression : tout était imprimé sur une seule ligne. Certes, rien ne manquait, mais j'eus tout de même le sentiment de perdre quelque peu en lisibilité et dus donc m'en défaire, deux jours après avoir investi dans l'achat onéreux de nouvelles cartouches d'encre couleur grande contenance.
Je me consolai en pensant qu'au moins Anatole tenait encore la route. A peine avais-je lancé cette réflexion que mon écran défaillit mollement et bascula dans le noir le plus complet. Il revint à lui quelques secondes plus tard, avant de s'évanouir encore. Après un long repos, il fonctionna de nouveau et je conclus qu'il ne me serait plus possible désormais que de travailler par session de 30 minutes avant le couvre-feu. Une collaboration laborieuse de six années s'achevait. Tout me lâchait : Internet et ma Freebox, Anatole et mon écran, mon imprimante, jusqu'à ma Téfal qui se révélait plus attachante que ne le laissait entendre l'argument publicitaire collé sur son flanc généreux... Seule la lunette des toilettes accomplissait exemplairement son destin - et quel destin, pensé-je à l'heure où le prince et sa maîtresse officialisent leur adultère public !
Il me fallait réagir : je fonçai chez Surcouf et en repartis une poignée d'heures plus tard avec un splendide Vaio et une imprimante HP. Mes agneaux, si vous voyiez mon portable ! Un beau bébé de 3,9 kgs, Pentium Centrino, 80 Go, 512 Mo de RAM, écran 17 pouces Widescreen à technologie black LCD, lecteur-graveur de DVD double-couche : une merveille de technologie avec une pure résolution de 1440x990, qui émeut chaque jour mes mirettes qui se sont trop usées au scintillement de mon ancien moniteur à fréquence compassée.
Enfin, hier, je n'y tins plus et récidivai en contactant une ultime fois la Hotline de Free. Le technicien me demanda de nouveau un numéro de portable. Si j'avais su, j'en aurais inventé un. Je n'avais toutefois pas le coeur à rire. Je lui répétai sans conviction l'odyssée de ma déconnexion. Il me révéla placidement l'origine du problème : j'utilisais une connexion USB avec une Freebox V.4 sur un réseau dégroupé et migré en ADSL2, ce qui constituait une combinaison de facteurs impossible. Pour que ma connexion fonctionne, il me fallait impérativement utiliser une carte Ethernet ou, au pire, une connexion en USB2. J'hallucinais : pourquoi ses collègues avaient-ils inventé de sombres et trop crédibles histoires d'accidents de serveur ou de migration retardée, quand il suffisait d'étudier ma connectivité - que j'avais indiquée à chacun de mes interlocuteurs - pour résoudre le problème ? Mon expert ès Free se trouva coi et ne sut que répondre. Je lui exprimai en termes choisis mon désappointement. Il ne manifesta pas la moindre réaction ; l'habitude sans doute. Je le saluai en renouvelant mon mécontentement ; il me souhaita au nom de toute l'équipe de Free une bonne soirée.
Elle le fut.
Depuis hier, après un carême forcé de 23 jours sans Internet, je réapprends à surfer. J'ai presque recouvré mes réflexes d'antan. Sur mon nouveau PC, ma connexion ultra-rapide me donne l'impression d'avoir des ailes. De quoi faire une MAJ de ce site qui agonise ? Ben non, j'ai 1500 mails en attente à écluser.
Choisissez la performance et une hotline irréprochable : choisissez Free.
Saute-Mouton - http://realia.free.fr/sautemouton_avril/newsprt.php?lng=fr&pg=715 - [Version PDF]